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Découvrez le C2RMF – Centre de recherche et de restauration des musées de France
27 avril 2023Nouvel adhérent de la SFIP, le C2RMF, service à compétence nationale du ministère de la Culture, met les sciences au service de l’art pour une meilleure connaissance matérielle des œuvres et la mise en œuvre de stratégies en conservation et restauration des collections patrimoniales.
Les missions du C2RMF s’adressent aux 1220 « musées de France», par le biais de projets d’ampleur et de contenu variés, du bipartites aux projets européens, il noue des partenariats avec d’autres domaines patrimoniaux, des universités, des fondations, etc.
Il constitue et diffuse une documentation sur les matériaux, les techniques et la restauration des collections.
Le C2RMF se répartit sur trois sites : deux dans le Palais du Louvre et à la Petite écurie du roi à Versailles, où se côtoient, au quotidien, près de 140 professionnels aux profils variés : scientifiques, historiens de l’art, conservateurs, archéologues, mais aussi photographes, radiologues, restaurateurs, techniciens, documentalistes et administratifs.
II est constitué de trois départements : recherche, restauration, conservation préventive et de deux missions : bibliothèques, documentation et archives d’une part et nouvelles technologies de l’information d’autre part.
La filière XXe-Art Contemporain du Département restauration
S’il est aisé de définir la période chronologique/ temporelle des collections pour lesquelles la filière est sollicitée, la typologie des œuvres concernées est en revanche très vaste, depuis les peintures de chevalet relativement traditionnelles jusqu’aux installations et aux œuvres électro-mécaniques qui constituent une part importante de la création contemporaine. Dans ce champ presque infini des matières et des techniques employées par les artistes, la filière a orienté ses thématiques de recherches depuis une quinzaine d’années sur les peintures (peintures pour artistes et peintures industrielles) ainsi que sur les matériaux synthétiques, présents aussi bien dans le domaine artistique que dans le domaine du patrimoine scientifique et technique qu’il s’agisse d’aile d’avion, de volant de voiture ou de lunettes. Ces objets ont bénéficié d’études et d’intervention de conservation et de restauration ; ils ont pour point commun d’être composés de matériaux synthétiques, principalement issus de la chimie du pétrole et de présenter des dégradations souvent irréversibles qui peuvent conduire à la destruction totale d’un objet.
Ces matériaux synthétiques sont présents dans de nombreux revêtements décoratifs ou protecteurs de surface, ils entrent également dans la composition du plastique qui prend des formes très différentes – films souples, plaques, mousses, objets moulés, fils et fibres, etc. Ils peuvent composer tout ou partie des objets patrimoniaux, mais force est de constater qu’ils mobilisent souvent une grande partie de l’attention même s’ils sont minoritaires dans un objet composite voire une collection.
L’identification comme préalable à la conservation restauration
Une étape préalable d’indentification est primordiale et essentielle pour détecter, différencier, prédire l’évolution, diagnostiquer les dégradations de ces nouveaux matériaux non-conventionnels et mettre en place des actions de conservation curative ou préventive adaptées. Elle prend tout son sens dans un contexte muséal en raison de l’instabilité, souvent inéluctable, de ces matériaux car au-delà des transformations chimiques et physiques qui en modifient l’apparence et les propriétés mécaniques, certains émettent des composés qui s’avèrent dangereux pour d’autres matériaux conservés à proximité, mais aussi pour eux-mêmes lors de conditions d’exposition et/ou de conservation inadaptées. De même des incompatibilités existent entre certains matériaux interdisant des contacts simples, comme un emballage pour une mise en réserve ou interpénétrés comme l’utilisation d’un adhésif ou d’un consolidant. La question d’un ’simple’ nettoyage est aussi la source de grandes préoccupations.
Pour répondre aux besoins d’identification la spectrométrie infrarouge à transformée de Fourier (IRTF) est une technique d’analyse non invasive (sans prélèvement) particulièrement adaptée et grâce à la configuration portable de l’équipement dont la filière est dotée, il est possible de conduire les analyses dans les réserves des musées, les salles d’exposition ou les ateliers de restauration. Pour des besoins de caractérisation, c’est-à-dire la détection d’additifs qui peut s’évérer nécessaire pour aller plus loin dans la connaissance de l’objet et le plus souvent pour comprendre ses altérations, il faut envisager un micro-prélèvement (taille inférieure à 1mm²) et avoir recours à une analyse avec le couplage pyrolyse-chromatographie en phase gazeuse-spectrométrie de masse (Py-GCMS).
Vers de nouvelles pratiques en conservation restauration
Ces identifications réalisées se posent alors la question de la restauration de ces matériaux synthétiques pour lesquels les protocoles éprouvés sur les matériaux constitutifs du patrimoine antérieur au XXe s’avèrent le plus souvent inadaptés. Si aujourd’hui des solutions respectant les exigences déontologiques de la restauration ont été développées pour les peintures synthétiques labellisées beaux-arts ou à usage domestique détournées de leur destination et conservées en intérieur, la restauration des peintures à usage industriel (automobile, mobilier urbain, architecture etc.) conservées en extérieur et des plastiques bousculent ces fondements. Ainsi il peut arriver que la re-fabrication, le remplacement (utilisation d’un strict équivalent) ou la substitution (autre matériau aux aspects et propriétés proches de l’élément d’origine) soient des alternatives possibles et parfois même préférables à une intervention classique.
Le statut allographe (matériaux consommables, objets de récupération ‘ready-made) ou autographe (crée ou modifié par l’artiste ou porteur d’une signification particulière qui le rend unique) de l’élément dégradé oriente de fait le choix de l’intervention vers, respectivement, des solutions de remplacement-substitution ou de restauration. Ces deux options sont souvent à l’initiative de recherches visant à éprouver le matériau choisi qui doit être au moins aussi stable que celui qu’il remplace et/ou présenter une innocuité totale pour l’élément sur lequel il est appliqué.
Des matériauthèques et des réseaux en construction
La connaissance de la diversité des matériaux de synthèse, la compréhension des phénomènes d’altération, le suivi de l’évolution des formulations nécessitent de constituer des matériauthèques. Celles-ci sont également exploitées pour l’optimisation de protocoles d’analyse et la constitution de base de données utilisées pour l’interprétation des résultats analytiques.
Ces matériauthèques sont élaborées selon deux processus d’acquisition : l’achat d’objets sur des sites de ventes en ligne ou dans des vide-greniers pour avoir accès à des formulations qui ne sont plus en vigueur en raison de l’évolution des techniques de fabrication ou de la législation qui interdit l’utilisation de certains additifs par exemple. Ce mode d’acquisition permet également de disposer d’objets présentant des altérations plus ou moins avancées et consécutives à un vieillissement naturel, ce qui représente un atout pour la compréhension des dégradations observées dans les collections. Lorsque des séries d’objets sont disponibles, elles peuvent être employées dans des expérimentations de conservation préventive ou curative.
La seconde voie d’acquisition est le partenariat avec des professionnels de la plasturgie et des revêtements. Cela permet d’avoir accès à des matériaux de formulations actuelles qui constitueront le patrimoine de demain, voire des fabrications à façon pour des expérimentations, de bénéficier de l’expertise des industriels en matière de vieillissement, de comportement physico-chimique, de compatibilité des matériaux entre eux, etc. pour envisager de nouvelles solutions de conservation restauration.
POUR ALLER PLUS LOIN
Retrouvez ci-dessous, les liens vers les vidéos des Journées d’Etudes du C2RMF sur les matières plastiques dans le patrimoine :
https://www.youtube.com/playlist?list=PLkvwQRscRlaR9BzVtzLI0kmQ7cwX3ho1j
https://www.youtube.com/playlist?list=PLkvwQRscRlaRe7HVRMNkyYIXTornWfPvs
https://www.youtube.com/playlist?list=PLkvwQRscRlaRd8q2VgSMqJ6oQ0891Rct7
Ne manquez pas le Keynote Speech du C2RMF « Modern materials in cultural heritage : issues and insights » lors du congrès international Eco-Responsable Colors, Materials & Finishes les 4 & 5 octobre 2023 à Troyes
Webinaire : L’empreinte environnementale des plastiques, comment la calculer, comment la réduire ?